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Ben Harper and the Blind Boys of Alabama : "There will be a light" God is in the house mercredi 20 octobre 2004, par |
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Plus il vieillit, plus Ben Harper semble s’approcher de ce qu’il doit considérer comme l’Eden. En effet, que penser du disque qu’il vient de sortir avec les Blind Boys of Alabama, sinon qu’il y réalise un rêve d’enfance ? Féru de blues et de gospel, c’est pourtant avec du bon vieux rock qu’il se fera connaître, avec des clins d’oeil au reggae. Au fil des albums cependant, le ton va en s’amenuisant dans la forme et, celui qui semblait n’être au début qu’un clone indie hybride de Jimmi Hendrix et de Bob Marley s’avère être un artiste chevronné, perfectionniste et sensible. Il nous livre ici un testament très touchant.
Sa voix doucereuse et sa guitare - le plus souvent sur les genoux - vont l’installer dans une posture pas très confortable, au propre comme au figuré. En effet, c’est un songwriter idéaliste qui prend son instrument dans la plus pure tradition folk : c’est pour lui un combat de tous les jours de diffuser la bonne parole, quitte à ce qu’on le taxe de naïf. Mais, pour lui, ne rien faire serait bien pire. Quitte aussi à ce qu’on le traite de prétentieux, lui qui prend des poses de grand sage qui distribue ses bons conseils et sa musique dictée par Dieu, avec qui il semble être en conversation perpétuelle. Vous l’aurez compris, le talent indéniable qui caractérise ce compositeur hors pair lui fera aussi perdre parfois la réalité des choses, et de potentiels auditeurs énervés par ses airs de paon en chasse. De manière controversée, ce qu’il veut combattre le fait rentrer dans cette catégorie d’artistes black qui, à force de combattre le racisme et d’étudier l’histoire de leur ethnie, se retrouvent à penser que cette place de martyr n’est peut-être pas un hasard. Et de là à se prendre pour l’envoyé il n’y a qu’un pas. Cela étant dit, et le personnage pouvant faire fuir quelques-uns (dont moi-même jusqu’ici), il convient de dépasser ces considérations qui ne devraient pas rentrer en ligne de compte pour qui veut apprécier la musique, et seulement la musique. En aparté, ajoutons que j’ai eu - comme beaucoup - le même problème avec des artistes à l’image "trop" forte comme Liam Gallagher ou Bono, qui ont le don d’en exaspérer plus d’un. Mais peut-être est-ce leur surmédiatisation qui est en cause, en somme. C’est donc, revenons à nos moutons, avec les mythiques et légendaires (mais pas encore enterrés pour autant, ni suicidés) Blind Boys of Alabama que Ben Harper décide de collaborer pour son nouvel album. Nous sommes ici en plein dans le gospel : Oh - Take my hand when you are worried - Take my hand when you’re alone - Take my hand and let me guide you - Take my hand to lead you home : autant pour la forme que pour le fond. Ces paroles teintées de spiritualité sont chantées comme s’il s’agissait d’une prêche (ce que gospel signifie littéralement). Cela importe cependant peu car les chants de ces vieux sages apportent un côté "travailleurs de champ de coton" (negro spirituals) qui ont accouché du blues et du rock. La guitare acoustique à la Ry Cooder fait le lien entre les deux genres. C’est une sorte de testament de la musique folk noire qui nous est proposée. Des titres plus rock comme Pictures of Jesus amènent une facilité d’écoute nécessaire face à ce genre d’œuvre. Le tout n’en est que plus plaisant car varié. L’Histoire côtoie le ludique, la légèreté se marie à la profondeur des belles paroles ou des prières. Satisfied mind est très intense, avec un son amplifié frisant la perfection. La soul, avec un clin d’œil au reggae est présente sur There will be a light, où les falsetto émeuvent à fleur de peau. Church on time rappelle la pochette de l’album Burn to Shine, où Ben et ses acolytes avançaient tels les cowboys d’un western spaghetti. Enfin, last but not least, des titres a capella (Mother Pray) mettent en valeur des voix extraordinaires, fussent-elles aveugles. Ben Harper prouve ici qu’il est, n’en déplaise à certains, un grand artiste, capable de s’entourer et d’honorer les anciens. Son dernier né est sublime. Il est de ceux qui ne prendront pas la poussière car il est indémodable. De là à dire qu’il a eu une illumination, il n’y a qu’un pas. |
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